Migrer vers un PABX-IP : comment s'y préparer

Date : mardi 14 février 2006 @ 20:43:59 :: Sujet : Telecom info divers

Mise à niveau du réseau, du câblage et de l'alimentation, sécurisation du tout et formation des futurs utilisateurs sont autant de passages obligés.

« Nous basculons notre premier site, à vocation administrative, en téléphonie sur IP avec quatre cents postes adaptés. Deux liaisons 10 Mbit/s voix et données ont été mises en place », note Denis Poiret, responsable de la téléphonie de l'AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris). Ces propos, énoncés lors de la conférence-débat organisée à la mi-novembre par l'Association française des utilisateurs de télécommunications (Afutt), montrent la lenteur du processus de migration de certaines grandes entreprises vers la téléphonie sur IP.

L'ampleur de la tâche à accomplir explique, à elle seule, ce peu de hâte. « L'Assistance publique représente une centaine de PABX et quatre-vingt mille lignes téléphoniques. Nous avons commencé par déployer le transport de la voix sur IP entre nos sites », ajoute Denis Poiret. D'autres entreprises mettent aussi en cause une certaine frénésie commerciale des fabricants de PABX-IP. « Les équipementiers ont voulu s'adresser à différents niveaux d'interlocuteurs, ce qui n'a pas facilité notre prise de décision. Résultat : nous avons perdu deux ans, mais nous allons déployer deux cents téléphones IP début 2006 », déclare Dominique Milliote, responsable des opérations au sein d'une entité de production du CIC.

La principale motivation pour investir dans un PABX-IP est l'obsolescence de l'installation existante. La durée de vie moyenne d'un PABX numérique TDM (génération technologique des années 90) se situe aux alentours de sept ans. Certains matériels voient cependant leur durée de vie étendue. À la mairie d'Arles, le PABX en place affichait douze années de service lorsqu'il a été remplacé, en 2005, par un système de nouvelle génération basé sur deux serveurs d'appels redondants installés par Amec Spie.

La période actuelle est plus favorable aux migrations vers IP qu'elle ne l'était il y a deux ou trois ans. D'une part, les offres de constructeurs ont gagné en maturité, le coût des liaisons xDSL qui raccordent ces systèmes est devenu plus abordable que celui des accès primaires RNIS, et les prix des téléphones IP baissent (certains modèles sont aux alentours de 100 €). D'autre part, les années 2005, 2006 et 2007 correspondent à la fin de vie des PABX acquis ou renouvelés en 1996, lors du passage à la nouvelle numérotation téléphonique nationale à dix chiffres, ou en 2000, au moment du changement de millénaire. Les fabricants comptent beaucoup sur ce renouvellement de parc pour convaincre les entreprises.

En matière d'architecture technique, la téléphonie sur IP est une application distribuée sur le réseau, dotée néanmoins de ses propres contraintes. La première d'entre elles est liée à l'exigence de disponibilité du service téléphonique. Rendons grâce aux architectures propriétaires : les PABX numériques traditionnels tombaient très rarement en panne. Pas question donc de risquer, en migrant vers un PABX-IP, la moindre dégradation en termes de disponibilité.

Les flux de voix sont aussi très sensibles à la qualité de service sur le réseau Ethernet-IP de l'entreprise. Cela implique de repenser l'architecture du réseau (redondance et dimensionnement des liens WAN) ainsi que les équipements actifs. La téléphonie exige tout à la fois un faible délai de transit des paquets voix dans le réseau, une faible gigue (variation du délai de latence) et un taux minimal de perte de paquets. Les entreprises candidates à la migration aboutissent souvent à la réflexion suivante : mon réseau Ethernet-IP est-il prêt pour la téléphonie ?

Préserver la qualité audio de la voix

L'affectation de priorité stricte sur le trafic de voix au niveau des commutateurs Ethernet et des routeurs satisfait à ce besoin de préserver la qualité audio de la voix. Il est aussi recommandé de connecter les équipements téléphoniques sur des VLan ou sous-réseaux dédiés, protégés de ceux qui sont réservés à l'informatique.

Les aspects sécuritaires sont, évidemment, à ne pas négliger. L'infrastructure de téléphonie sur IP est potentiellement sensible aux mêmes menaces (attaques de déni de service, virus ou vers) que celles que subissent les réseaux informatiques d'entreprise. Par ailleurs, des attaques spécifiques à cette téléphonie sont à envisager, comme le piratage de lignes par des intrus, pour téléphoner gratuitement sur le dos de l'entreprise.

Dans tous les cas, il faut gérer la sécurité en amont

Le recours à la palette des outils de protection tels que les boîtiers de détection-prévention d'intrusions ou la gestion du chiffrement des flux de voix et de signalisation sont alors à préconiser. Dans tous les cas de figure, la sécurité doit être gérée en amont. « La mise en oeuvre de la téléphonie sur IP doit être, pour les entreprises, l'occasion d'élever le niveau de sécurité de tout le système d'information », aime à rappeler Bernard Mérindol, consultant en téléphonie sur IP chez 3Com France.

Les contraintes de câblage du ou des sites à équiper sont également à prendre en compte. Il convient d'agir au niveau de l'infrastructure électrique. Ainsi, les téléphones IP ont besoin d'une alimentation électrique en 48 V, qui doit être prévue dès le départ. Contrairement aux téléphones numériques, ils ne sont pas naturellement téléalimentés par le PABX. Le courant peut leur être fourni de trois manières : par un adaptateur local de courant, par un panneau de brassage s'intercalant entre le commutateur Ethernet et les téléphones IP auxquels il fournit le courant, et, enfin, par un commutateur intégrant des capacités de téléalimentation électrique via le câble Ethernet.

Ce matériel est toutefois plus onéreux qu'un commutateur Ethernet. Dans les deux dernières possibilités, le surcoût des équipements d'injection de courant électrique ne doit pas être négligé. Il faudra aussi probablement sécuriser l'alimentation électrique en amont par un onduleur prenant le relais en cas de coupure, afin que le service téléphonique soit toujours disponible. Concernant le déploiement de téléphonie sans fil in situ, le choix le plus rationnel, en raison du coût des terminaux, est aujourd'hui l'adjonction de bornes Dect couplées à une passerelle idoine, intégrée au PABX IP.

Ne pas négliger le facteur humain

Le facteur humain sera enfin déterminant dans l'acceptation du changement que constitue l'installation d'un système de téléphonie privée sur IP. Son importance doit être modulée selon la technicité de la population concernée ou selon le degré d'utilisation. Une formation, même légère, à l'utilisation du nouveau système téléphonique et à ses possibilités en termes de messagerie unifiée sera souvent nécessaire.

À partir de leur téléphone IP, les utilisateurs seront également amenés à gérer eux-mêmes, parfois, le routage de leurs appels entrants en cas d'absence. L'enrichissement de ces fonctions, utilisées au quotidien, constitue une rupture au moins aussi importante que l'est un changement de logiciel bureautique ou applicatif. L'implication forte des personnels dans ce type de déploiement reste un gage de succès.

Damien Lopez (responsable réseaux et télécoms de la ville d'Arles)
« L'accès direct à l'annuaire téléphonique est l'une des applications les plus utilisées. »

Depuis mai 2005, la ville d'Arles est pilotée par deux serveurs de téléphonie sur IP redondants CallManager, de Cisco Systems. Fonctionnant en partage de charge, ils sont installés dans deux bâtiments reliés par fibre optique. À la fin du déploiement, prévu au premier trimestre 2006, plus de huit cents téléphones IP seront installés : les modèles 7912, 7940 et 7960 de Cisco. Chaque personnel suit une formation à l'issue de laquelle il reçoit son terminal.

Les applications les plus utilisées sont l'accès direct à l'annuaire téléphonique des employés de la mairie et l'audioconférence. L'investissement total d'environ 300 000 € dans le réseau de ToIP a été amorti par la réduction des abonnements à France Télécom et l'utilisation d'infrastructures alternatives comme la fibre optique et les ponts Wi-Fi et laser pour relier les sites de la ville.

L'enjeu de la console opérateur

Si les employés munis d'un téléphone de bureau sont l'objet de toutes les attentions lors d'un déploiement de PABX-IP, les standardistes de l'entreprise sont tout aussi concernés. Ils peuvent jouer un rôle clé dans l'utilisation d'applications rendues possibles par la téléphonie sur IP, comme l'accès au partage d'agendas électroniques ou la disponibilité des personnes qu'on cherche à joindre. À côté des offres de console opérateur fournies avec le PABX-IP, il existe aussi des logiciels qui gèrent des fonctions évoluées de gestion d'annuaire ou de routage d'appels, tel CMG, de Netwise. Le suédois vient d'équiper Airbus, qui a retenu les PABX-IP de Cisco Systems.

Source: www.01net.com






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